RC APS : Soirée
conférence avec Michel Vernus – Les Comtois et l’argent :
C’est toujours agréable d’accueillir
une personne pour une conférence sur un sujet original et celui que va
présenter Michel Vernus l’est assurément !
En effet l’argent, qui est le
moteur de l’économie…et celle de tout un chacun avec son porte-monnaie, et d’en
savoir un peu plus sur le sujet doit être passionnant !
Dans un cycle de conférences
que le Club souhaite entretenir et développer , celle qui reçoit ce soir Michel
Vernus l’est naturellement, et le choix a été judicieux !
Pas une assistance des grands
jours, mais les habitués ont répondu présents et ne l’ont pas regretté !
Le Président Christian
Nicolas a souhaité la bienvenue et remercié Michel Vernus d’avoir bien voulu
venir parler de son dernier ouvrage ……..
<<Au nom de tous les
membres de notre Club Rotary d’APS, nous avons l’honneur de vous accueillir ,
Monsieur Vernus pour une conférence avec la présentation de l’un de vos
derniers ouvrages « Les Comtois et l’argent » et nous vous en
remercions.
Originaire du Jura, vous
êtes un grand historien Français, aussi bien en histoire moderne du monde des
années traversant les 18ème et 19ème siècle, qu’en histoire
contemporaine.
Grâce à votre sens de
l’observation, grâce à l’intérêt que vous avez su porter sur la façon de vivre
des « gens d’ici », leurs modes d’actions individuelles ou
collectives, leurs créativités, vous avez pu retranscrire l’évolution de leurs
idées et mettre en valeur tout ce que les hommes ont pu construire , tout au
long des années qu’il ont traversées, à la fois dans vos livres et dans vos
tableaux
.
Vous avez publié une
soixantaine d’ouvrages et près de 200 articles de référence sur le Jura et la
Franche-Comté, notamment le « Pays des fromages » et le Comté
….>>
Michel Vernus est
passionnant et il sait pimenter son intervention d’anecdotes, parfois
pittoresques , mais laissons lui le soin de présenter son livre :
Ce livre s’inscrit
dans ma démarche d’historien, il est mon 64e ouvrage. Chacun de ces
livres veut être une lucarne ouverte sur le passé comtois.
Alors l’argent et
les comtois est un vaste sujet. L’argent, c’est la monnaie monnaie
métallique, de moins en moins métallique, le crédit et l’endettement, le prix
des choses, les salaires, les impôts, la gestion des biens, l’argent mal
acquis par les filous. J’aborde tout cela.
Mon livre n’est
pas un livre de technique bancaire, de technique fiscale ou de technique
monétaire. Je ne suis pas banquier, ni « rat de cave ». Je suis
historien, donc je raconte, je cherche à raconter la vie quotidienne des
populations de notre région. L’argent est un formidable miroir qui montre tous
les recoins d’une société. Je raconte à travers l’argent les passions, les
colères, les angoisses, les peurs, les joies de toute une société, à
travers les siècles, en panorama. Les bonheurs et les malheurs de nos
populations.
La documentation
utilisée ? Les registres de comptes, les livres de raison, les
dossiers des notaires, qui ont beaucoup à nous dire sur l’argent. J’ai analysé
les vieux proverbes, les vieilles légendes (la vouivre par exemple).
Ce livre m’a amené
à revisiter l’histoire de notre région. J’en ai suivi les grandes
évolutions, j’en ai retiré aussi des faits divers pittoresques, cocasses ou
tragiques.
La grande question
était surtout de savoir s’il y avait un rapport original de notre région à
l’argent.
La réponse est
oui.
1/ Les comtois
n’aimaient pas que l’on mettent le nez dans leur « butin ». Ils
disaient « Qui montre sa bourse, se montre tout nu ». Ils étaient
réputés près de leurs sous. Les Bourguignons disaient des comtois « ils
sont larges, mais des épaules seulement ».
Les comtois
n’aimaient pas les fanfarons « ceux qui s’en croient » qui font
parade. « Pour vivre heureux pas d’amourettes, pas de procès, pas de
dettes »
Il existait une
méfiance à l’égard de l’argent, méfiance qui provenait de la puissante
influence de l’Église catholique aux XVIIIe et XIXe s., qui condamnait le prêt
à intérêt, qui diabolisait une certaine forme d’argent
2/ Les comtois ont
inventé des systèmes de partage et de solidarité : l’affouage, les
fruitières... Ils ont inventé le crédit agricole en 1885. Les polinois Milcent
et W. Gagneur ont dit des choses là-dessus, mais aussi Fourier, Proudhon,
Considerant. Se concurrençaient deux courants: d’une part le courant laïque des
innovateurs sociaux comtois Fourier, Proudhon, Considerant, d’autre part le
courant religieux du catholicisme social incarné par exemple par Milcent.
3/ Le capitalisme
familial qui est à l’origine de l’industrialisation de la région aux XVIIIe
-XIXe siècles dont Papy et Peugeot sont les symboles mais que l’on retrouve
dans l’alimentation, la métallurgie, le jouet, l’horlogerie…
Aujourd’hui, il
est loin le temps ou la F-C avait sa propre monnaie. Elle est soumise aux
grands flux monétaires et bancaires mondiaux. Il y a des résistances, la
monnaie locale de la « Pive » lancée à Poligny en est un minuscule,
mais réel exemple.
Une dernière
conviction, lire le passé, c’est aussi mieux lire le présent, mieux voir aussi
où l’on va.